Notre ARCEP national s’intéresse de près à la neutralité des réseaux et de l’internet en organisant une conférence le 13 avril prochain. De son coté le groupe UMP de l’Assemblée Nationale ouvre le débat sur son site Ethique du Numérique, avec une rubrique dédié à la neutralité. Le débat s’agite enfin, et c’est tant mieux.
Sans doute aussi que les agitations américaines ne sont pas étrangères à tout ce Barnum. Battons le fer tant qu’il est chaud.
Un peu d’histoire
Il est important de revenir au fondamentaux pour comprendre la situation actuelle et apporter des directions et des solutions intelligentes pour le futur.
Sans être aussi exhaustif qu’Alec, je rappelerai juste qu’Internet a démarré dans l’hexagone avec des débits très faibles, 100 fois plus lents que ce qu’on peut avoir aujourd’hui. Bref, on a démarré avec des pages web, de la messagerie et un peu de chat. Ce joli monde était au début relativement léger (quelques précieux octets). L’ensemble s’est vu prendre de l’embonpoint au fur et à mesure de l’augmentation des capacités de nos réseaux.
Parmi les faits marquant de l’internet, on retiendra sa professionnalisation : le média est devenu un outil de travail indispensable, il est le support à d’importantes transactions financières (avec l’essort du e-commerce mais ce n’est pas le seul exemple). Il est aussi devenu un média puissant à tel point qu’il devient le complément indispensable, voire un concurrent, aux médias traditionnels.
Aujourd’hui sur Internet, vous visualisez les photos de madame Michu, vous regardez YouTube, vous twittez, vous écoutez de la musique, vous louez des films, vous mettez à jour votre ordinateur pour qu’il soit toujours protégé. Je ne peux éviter de parler de l’essor du piratage qui représente plus de 50% de ce qui transite sur le réseau public. C’est une donnée importante.
L’explosion
Ces progrès ont fait des autoroutes de l’information des voies ultra rapides qui font transiter chaque seconde plusieurs dizaines de gigabit de données toutes les secondes à la petite échelle de la France. Durant les 10 dernières années, les fournisseurs d’accès ont rivalisé de nouveautés. La France est un terrain de bataille propice à la concurrence et le groupe Iliad a créé un précédent presque sans autre équivalent dans le monde en lançant des offres moins de 30 euros.
A ce prix vous avez non plus 1 megabit/s, ni 2 ni 4, vous avez accès au débit maximum que peut vous offrir votre pair de cuivre avec la technologie ADSL. Dans les centres urbains on se retrouve ainsi avec des connexions atteignant plus de 15 megabits/s.
Un excellent point pour le consommateur.
Net neutralité, quel est le problème ?
Un des principes fondateurs d’Internet fût la différentiation entre les tuyaux et ce qui passe à l’intérieur : les contenus.
Ca paraît évident mais lorsque vous souscrivez à un bouquet de chaînes, l’opérateur vous propose d’utiliser ses signaux (satellite, câble ou ADSL) pour recevoir les émissions, films et autres programmes télévisés que lui et ses partenaires gèrent.
A l’opposé de ce modèle complètement fermé, le modèle Internet a permis l’éclosion de services innovants : les moteurs de recherche, la téléphonie/vision-conférence, la musique et les films. Où que vous soyez, vous avez accès à une multitude de service qui transite par les tuyaux de votre fournisseurs d’accès contre monnaie sonnante et trébuchante prelevée chaque mois.
Normalement, votre fournisseur d’accès n’a pas à proprement dit à regarder ce qui passe dans les tuyaux. En gros, c’est effectivement ce qu’il fait mais pour des raisons bassement techniques, les paquets doivent être dirigé vers le bon destinataire et parfois même se voir appliquer une priorité. C’est à ce titre que les contenus téléphone sur IP et télévision (service opérant sur le réseau interne du fournisseur) se retrouvent prioritaire par rapport aux données purement Internet. Personnellement, je trouve que ça n’a rien de choquant : cela part de l’intention de proposer un service de qualité aux abonnés.
Là où ça devient compliqué, c’est lorsque des opérateurs prennent des libertés comme interdire l’utilisation de certains services. Ainsi Skype s’est vu interdit d’utilisation sur les réseau Internet mobile chez l’opérateur AT&T (l’interdiction a été levée depuis).
Pourquoi se livrer à de telles initiatives ? Certains évoquent la sécurité du réseau, d’autres le font clairement pour éviter la concurrence. Des raisons, personne n’en manque mais du coup la neutralité en prend un coup !
On comprend donc l’importance de cette neutralité.
Un écosystème qui n’est plus le même ?
Le visage de l’internet a évolué, le trafic est de plus en plus important à mesure de la complexité des informations : information temps réel, video haute définition. Ce visage est-il pour autant si différent qu’à ses débuts ?
Je ne pense pas, tout est une question d’échelle et d’organisation pour anticiper ces changements d’échelle. Les contenus ont changer de nature, de complexité. Continuer à opérer des réseaux aujourd’hui comme on le faisait il y a 10 ans mais simplement en mettant de plus gros tuyaux n’est peut être pas la bonne solution.
Chacun y va de son argumentaire. Afin que tout le monde puisse se faire une idée des arguments de chacun, voici un petit collector des liens chauds du moment :
- Alain Bazot, le président d’UFC Que Choisir : N’oublions pas l’intérêt du consommateur.
- Un avis éclairé de Benjamin Bayard (French Data Network)
- Une des nombreuses démonstrations de Jean-Michel Planche
- Et pour finir, la définition Wikipedia et son équivalent en vidéo